fmi*igf Journal Autumn 2013, Vol 25 No. 1 - page 6

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JOURNAL IGF
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FMI
VOLUME 25, N° 1
« Ils ne saisissent tout simplement pas »
Dans mon enseignement et mes interactions
avec des cadres supérieurs du secteur public
et des commentateurs, j’entends dire que la
littératie financière, comme ils le décrivent,
se fait rare dans l’optique d’une bonne
administration publique. Ce manque de
connaissances se manifeste d’un certain
nombrede façons et reflètebien souvent leparti
pris de l’observateur. Les cadres supérieurs du
secteur public se sentent frustrés en constatant
que de brillants fonctionnaires chargés des
politiques ou des opérations obtiennent des
postes de responsabilité sans pour autant
posséder les compétences requises pour gérer
efficacement leurs responsabilités eu égard
des finances. Ils acquièrent trop souvent leurs
compétences financières en apprenant sur le
tas et en faisant des erreurs. De plus, ils ne
tiennent aucunement compte des coûts et des
conséquences financières connexes lorsqu’ils
présentent des propositions. Puisqu’on
accorde de nos jours toute l’importance
à la question des déficits budgétaires, ces
gestionnaires n’accordent pas suffisamment
d’importance à la question de la réduction des
coûts ni aux mesures visant à éviter les coûts.
Lorsque j’enseigne à des fonctionnaires
inscrits à notre programme professionnel,
je constate que ces derniers ressentent
de l’incertitude relativement à leurs rôles
financiers. Bien souvent, ils ne savent pas
clairement tracer une ligne nette entre
leur rôle et ceux des conseillers financiers.
Ce n’est certes pas une question facile. Ils
ne savent pas trop quels sont les niveaux
de connaissances financières dont ils ont
besoin pour accomplir leur travail. Je peux
pratiquement entendre quelques-uns d’entre
eux demander « Y suis-je arrivé? » pour ce qui
est de comprendre leur rôle financier et de
l’exécuter efficacement. La réalité, bien sûr,
est que ces personnes n’y arrivent jamais tout
à fait, car les demandes du travail changent et
s’adaptent au milieu changeant de la gestion
financière dans le secteur public.
Des cadres supérieurs ou des experts
financiers ont trop souvent dit « ils ne
saisissent tout simplement pas » en parlant
de gestionnaires du secteur public en général.
Qu’est-ce qu’ils ne saisissent pas au juste?
L’importance d’une administration financière
efficace. L’importance de réduire les budgets.
L’importance de bien évaluer les coûts.
public. Ma conclusion, toutefois, est que
la littératie financière ne sera possible que
lorsqu’on comprend qu’il s’agit d’une notion
à deux sens. Pour avoir un gestionnaire
possédant une bonne littératie financière il
faut aussi une organisation qui possède une
bonne littératie financière. C’est plus qu’une
simple question de compétences personnelles
et de formation. En fait, il faut du leadership
et une bonne gouvernance aussi. Je dis donc
à ces gestionnaires de haut niveau qui se
plaignent des prouesses financières de leurs
gestionnaires : « occupez-vous de vos propres
responsabilités dans tout cela ». À suivre. Il
semblerait que si la littératie financière est
absente dans certains gouvernements, mais
abonde dans d’autres que la question doit
revenir aux cadres supérieurs et aux experts –
que planifiez-vous faire dans ce cas?
Le gestionnaire ayant acquis une
littératie financière
Un trop grand voile entoure toutefois cette
question. La littératie financière n’a rien de
magique. Il suffit d’y travailler. Les cadres
hiérarchiques n’ont pas à devenir des experts
en finances pour autant. Ils doivent toutefois
devenir des utilisateurs éclairés d’information
financière, non pas qu’au moment où elle
leur est présentée sous forme de compte
rendu régulier dans leur boîte de réception
électronique ou sur le site Web du ministère,
mais tout au long des processus d’élaboration
des politiques et de l’exécution.
Voici quelques-unes des caractéristiques
d’un gestionnaire du secteur public ayant
acquis une littératie financière. Il ou elle :
• comprend les rapports entre les politiques,
la prestation et les coûts;
• est en mesure de déceler parmi les chiffres
les hypothèses principales et de lier celles-
ci aux politiques ou au milieu de prestation;
L’importance de trouver de nouveaux moyens
de financer les projets. Bien souvent, ce sont
les personnes responsables de la gestion
stratégique de leur ministère ou organisme
qui relèvent ces lacunes chez les gestionnaires.
On constate certes qu’un thème revient
encore et encore : la littératie financière, quelle
que soit la définition qu’on y donne, est une
qualité qui doit faire l’objet d’améliorations
dans de nombreuses administrations gou­
vernementales. La littératie financière
chez les fonctionnaires publics revêt une
importance vitale pour la prestation efficace
de biens publics. Pourquoi? Parce que peu
de déclarations au sujet de politiques n’ont de
grande valeur jusqu’à ce qu’on sache quelles
ressources serviront à les concrétiser. De plus,
à mesure que les gouvernements déploient des
efforts dans le but de réduire leurs dépenses
générales, les effets des changements en
politiques, en prestation et en finances sont
de plus en plus entrelacés. Nous constatons
également qu’on se soucie maintenant des
effets intergénérationnels des décisions
stratégiques. Vu l’adoption d’une comptabilité
et d’une budgétisation d’exercice intégrales, le
gouvernement est moins en mesure de faire
des déclarations aujourd’hui sans tenir compte
des coûts de demain.
Enfin, la réaction publique vis-à-vis des
erreurs financières commises dans le secteur
public laisse supposer que les gestionnaires
publics ne peuvent pas gérer les fonds
efficacement – pour accomplir le travail
efficacement – obtenir le meilleur rendement
pour le prix et bien faire le travail – selon
les règles et avec probité. La vérité, qu’on
retrouve très rarement en manchettes sur
les sites Web de la presse, est que la plupart
des cadres supérieurs du secteur public
s’acquittent très efficacement de ces trois
tâches. Nous ne devons pas toutefois être naïfs.
Ces scandales soulèvent de nouveau, mais sous
un autre éclairage, les questions suivantes :
« quand a-t-on acquis une littératie financière
suffisamment robuste? » et « Y sommes-nous
arrivés? ».
Mais y a-t-il une destination finale? Je ne
pense pas que nous puissions nous entendre
collectivement sur la définition de l’expression
« littératie financière », et encore moins
sur ce qui constitue la maîtrise complète de
cette qualité. Je propose d’offrir quelques
idées au sujet de ce que constitue réellement
la littératie financière pour le gestionnaire
Qu’est-ce que la littératie financière pour le gestionnaire
public? La réponse représente une notion à deux sens
Andrew Graham
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